Que cette grande pièce qu'est la vie débute maintenant ! [Zelel Couritana]

Que la vie peut être ennuyeuse se disait Zélel à voix haute, allongé sur le toit d'un des nombreux bâtiments qui constituaient la ville, admirant le ciel qui était d'un bleu pur aucun nuage ne venant recouvrir cette mer céleste. Peu importe ce qu'il faisait Zélel n'avait goût à rien aujourd'hui et c'est dans ces moments qu'il visualisait son passé, tout ce qui l'avait façonnés.



Etant né et élevé au sein d'une famille assez aisée, le jeune homme n'avait jamais manqué de rien durant son enfance, recevant une éducation via des professeurs particuliers renommés. Son père désirait faire de lui l'héritier de l'entreprise familiale et était prêt à tout pour en faire l'homme qu'il voulait qu'il soit même si cela impliquait d'être strict, trop strict... Si le jeune Couritana avait le malheur de faire la moindre petite erreur, qu'elle que soit cette dernière, une pluie de sanctions venait s'abattre sur lui au grand désarroi de sa mère qui n'osait pas contredire son mari même quand celui-ci l'humiliait, le rabaissait ou même le blessait. Malheureusement cela n'était pas mieux quand il allait à l'école car même en étant à l'abri de son géniteur un autre danger le guettait en la présence des autres élèves qui le maltraitaient simplement dut fait de la richesse de sa famille. Le soir il rentrait chez lui, recouvert de bleu mais aucune exclamation de la part de ses parents comme si tout ceci était normale. C'est ainsi qu'il vécut son enfance, seul entouré par la noirceur de son entourage, toute lumière disparaissant dans sa vie innocente d'enfant.




Zélel, étant âgé maintenant de 14 ans, avait bien changé maintenant, devenant une machine à étudier sous les yeux observateurs de son père qui attendait la moindre occasion pour le punir mais le jeune homme n'en faisait plus depuis bien longtemps et même si sa avait été le cas il aurait subit sans broncher, le regard totalement vide. Il était voué à suivre la voie qu'on avait tracé pour lui et s'était résigné. C'est à cette époque que sa mère était enceinte d'un autre enfant, une fille plus exactement, tout le monde attendant cet heureux évènement même lui, sa mère étant la seule personne qui s'était montré compatissante envers lui, allant le voir en secret dans sa chambre et le consolant quand son père n'était pas là.
Elle devait accoucher d'un jour à l'autre et était resté à l'hôpital en attendant. Zélel, qui alors était au collège, avait été emmené derrière la bâtisse par une bande de jeunes pour se faire tabasser comme à chaque fois et alors que ses tortionnaires s'apprêtaient à partir, le jeune adolescent reçut un appel de son père.

"Zélel ta mère vient d'accouché mais..."

Le garçon savait déjà quel allait être la fin de sa phrase, il était au courant que sa mère était fragile de santé et qu'il y avait des risques, cependant une chose étonnante se passa, un sourire se dessina sur ses lèvres et il se mit à rire avant de marcher vers les jeunes hommes qui plutôt l'avait maltraité, riant et souriant toujours.

"La vie est vraiment étonnante... Nous ne sommes donc que des pions et dès que l'un de nous disparaît un autre pion vient prendre la relève c'est vraiment tordant !"

Le groupe de gamin ne comprenait rien à ce qu'il disait, légèrement effrayé par ce nouveau comportement avant de s'apprêter à lui redonner une leçon sauf que cette fois-ci ce fut Zélel qui leur en donna une, les frappant à mort malgré les coups qu'il prenait et au final les rôles furent inversés, se tenant au dessus d'eux pendant qu'ils mangeaient la poussière. Malgré ses blessures, il continua à rire et quitta l'enceinte de l'école pour rejoindre sa mère, la graine de la folie ayant germé en lui.



Il devait avoir 22 ans quand son père décida de déménager tout leur domaine familiale de la région de Kyoto dans une région plus calme du Japon dont Zélel n'avait jamais entendu le nom. Ils s'installèrent non loin de la ville prétextant que cela était mieux pour les affaires et qu'il fallait voir de nouveaux horizons mais le jeune homme savait que s'il partait c'est qu'ils avaient trop de mauvais souvenirs dans leur ville d'origine. De toute façon rien pour sa part ne le retenais ici et n'avait donc montré aucune réticence à ce projet, déposant finalement ses affaires dans sa nouvelle chambre. Il s'apprêtait à rejoindre sa nouvelle école quand sa petite soeur fit son interruption et le regarda avec ses grands yeux bleus, souriant joyeusement et souhaitant une bonne journée à son frère adoré. Il ne put s'empêcher de sourire en franchissant le seuil de la porte, un sourire sincère et tendre, sa sœur étant la seule personne arrivant à lui mettre un peu de baume au cœur, partant finalement pour une nouvelle vie ici en ignorant totalement que son premier jour à l'école serait aussi son dernier.

Les cours venaient de se terminer que notre japonais soupirait déjà, cette journée avait été d'un ennui qui lui rappelait celles de sa ville natale mais pour autant il n'était pas pressé de rentrer chez lui, trainant sur le chemin du retour et avant de s'en rendre compte la nuit était déjà tombé sur la ville, la recouvrant de son long manteau noir. Ce n'est qu'après quelques minutes que Zélel se sentit suivi mais se retournant il ne vit rien, reprenant alors son chemin et ce fut à cet instant, sans qu'il ne puisse s'en rendre compte qu'une ombre se mit à surgir derrière lui et en se retournant il croisa la silhouette d'un homme imposant.

"Cela fait un long moment que je te suis de près ! J'aimerais t'emmener dans un lieu que tu n'apprécieras sûrement pas... en tout cas pour le moment !"

L'inconnu ricana avant de contempler le jeune homme qui à son grand étonnement affichait une mine ravie. Ce dernier le regarda sans broncher, sentant juste un frisson de joie l'envahir tout en répondant d'une voix calme.

"Si je m'attendais à ce que l'on me fasse une telle proposition. Juste avant j'ai une dernière chose à régler ensuite je t'accompagnerai sans soucis."

Se mettant soudainement à ricaner intérieurement avant de laisser exploser un grand rire qui résonna dans toute la ruelle, recouvrant son visage de sa main gauche, ne laissant entrevoir qu'un sourire terrifiant, rentrant chez lui d'un pas lent mais déterminé.

Il fut accueilli chez lui par son père qui semblait visiblement très en colère de sa disparition, des veines se montrant le long de son front, lui demandant des explications mais sous le mutisme continu de son fils, il le frappa, fou de rage contre lui. Ce dernier vola de terre et alla s'écraser un peu plus loin, ne réagissant toujours pas, son père le relevant par le col et s'apprêtant à lui asséner un autre coup avant de s'arrêter net, le visage terrifié posant ses mains le long de son ventre et sentant un liquide chaud et rouge couler, tentant de se retenir à l'uniforme de Zélel mais s'écroulant finalement sur le tapis qui était déjà taché du sang du maitre des lieux. Le nouveau démon se dressa au dessus de lui, son sourire toujours figé sur son visage. Un bruit se fit alors retentir et Zélel regarda en haut des escaliers, voyant sa petite soeur effrayée et s'approchant finalement d'elle délicatement.

"Je suis désolé ma soeurette bien aimée mais je vais devoir te laisser seule, apprends à vivre et à survivre par toi même et peut être qu'un jour tu comprendra pourquoi j'ai fais ça"

Lui souriant pour la dernière fois tendrement, ébouriffant ses cheveux avant que cette dernière ne se jette dans ses bras en pleurant, le serrant pour qu'il ne parte pas mais elle ne put le retenir et le vit disparaitre dans la pénombre sans rien pouvoir faire.



Cela fait maintenant 20 ans que Zélel mène sa nouvelle existence, 20 années depuis sa transformation et à aucun moment son sourire ne disparut de son visage. Bien sûr les premiers jours furent difficiles, il dut apprendre comment réagir à cette vie qui s'offrait à lui, observant patiemment tout ce qui se passait autour de lui. Il voulait changer les choses, voulant savoir quel chaos il pouvait provoquer en ce bas-monde, allait-il mourir en essayant où atteindrait-il l'objectif qu'il s'était fixé en son for intérieur ? Tout cela le faisait se sentir vivant pour la première fois depuis longtemps, se redressant et observant la foule du haut de son toit, ricanant silencieusement avant de regarder au loin.

"Il est temps pour moi de bouger mes pions"