- Sebastian Rhodes:
Sebastian est un ancien agent de la CIA. Son destin a basculé quand il a découvert la supercherie de ses supérieurs. Ils l'ont utilisé pour commettre des meurtres par intérêt au nom de la puissance américaine Il a donc cherché à leur faire payer, en désintégrant l'organisation de l'intérieur. Mais suite à sa trahison, sa femme trouve la mort dans des circonstances étranges, tel un avertissement. Il a donc fui les Etats-Unis, avec sa fille Eleanor. Il est devenu prêtre pour aider autrui et cherche à construire sa propre rédemption, espérant pouvoir se pardonner à lui-même de toutes ces atrocités commises, ainsi que la mort de la femme de sa vie.
La pluie battante fouettait ses épaules tandis qu'il se tenait debout, totalement éteint, devant la tombe de sa femme défunte. Le cœur taillé par l'érosion d'une absence, l'ombre s'étendait sur son cœur comme un poison invisible qui le dissolvait, à l'intérieur. Il se fichait éperdument de l'humidité qui noyait sa tignasse ébène. Les gouttes tombaient sur son visage serré par une douleur insoutenable qui pourtant, ne vivait que dans ses entrailles, incapable de se formuler sur sa langue. Un cri strident, déchirant, qui s'emmurait seulement à travers un silence lourd et dense. Néanmoins, la noirceur habitait ses prunelles au cercle d'argent. Si un éclat les faisait habituellement luire, là, il ne s'agissait qu'un chaos infernal qui s'ouvrait derrière les fenêtres de son âme. Une colère terrifiante qui ne réclamait que d'éclater pour tout pulvériser sur son chemin
« Je savais que j'allais te trouver ici » Une voix grave, chaude et réconfortante émergeait derrière lui alors qu'un parapluie apparaissait au dessus de son crâne
« Va t'en » murmurait-il tout bas, en proie à une tristesse impitoyable qui le rongeait. L'homme pourtant, ne bougeait pas
« Écoute... » « Est-ce que tu savais ? » coupait-il ardemment, de ce ton musclé par une agressivité passive
« Me croirais-tu si je te disais que non ?» « Non » « Alors je ne dirai rien » Une main amicale se posait sur son épaule. Une poigne ferme, compatissante et prévenante
« Je suis sincèrement désolé Sebastian » Il avait l'air de l'être en tout cas mais pour l'agent de la CIA, cela ne changeait rien à la perte qu'il subissait
« Elle ne méritait pas de mourir... » Ses cordes vocales s'étranglaient dans sa gorge. C'était une femme rayonnante, époustouflante et aimante. Un ange incarné qu'il aimait bien plus que sa propre existence qui lui paraissait bien minable à présent. La douleur l'écrasait et chaque respiration devenait la manifestation même d'une culpabilité terrible.
Un bruissement de papiers se faisait entendre dans la poche de son mentor, qu'il lui présenta
« En gage de notre amitié, prends cet argent et ces faux papiers » Son regard tombait sur la brochure que Eddy lui tendait, ne prenant pas la peine de les saisir
« Je t'en prie. Fuis le pays. C'est tout ce que je te demande. Tu es désormais un ennemi des États-Unis d'Amérique. Tu as dépassé les bornes en livrant des informations hautement confidentielles à la Russie » « Tu sais aussi bien que moi que la CIA nous a utilisés, causant un carnage en se servant de nous comme des chevaliers de la mort pour laver leur linge sale »« Mais c'est ce que nous sommes Sebastian et tu as signé pour ça. C'est un contrat que tu as passé et que tu as brisé. A quoi est-ce que tu t'attendais ? »Ses yeux ridés se posaient sur son ancien apprenti, l'air sérieux. Cet homme l'avait récupéré dans un orphelinat infâme et l'avait élevé comme son propre fils tout en faisant de lui une arme sacrée pour les services secrets. Il avait su déceler chez l'adolescent à l'époque, un potentiel secrètement enfoui dans ses tripes. Ce maître avait la prestance charismatique et chaleureuse mais, cette apparence couvrait également un espion féroce et très dangereux. Mais malgré la règle qui imposait de ne pas faire dans le sentimentalisme, il s'était attaché à ce garçon, raison pour laquelle il le mettait en garde
« Si tu cherches à revenir ou à te venger, je me chargerai moi-même de ton exécution. Ne m'oblige pas à faire ça s'il te plaît. Je prends déjà un risque en t'aidant. Désormais, il te faudra te concentrer sur le plus important. Alors pense un peu à ta fille » Un éclat de conscience germait dans les rétines du concerné. Il avait évidemment songé à apparaître à nouveau pour semer l'enfer et peut-être qu'un jour, il le ferait. Mais énoncer sa fille de cette manière le laissait muet. Le mentor poursuivait
« Elysabeth était admirable. Je l'aimais beaucoup, moi aussi. Qui peut bien se vanter d'une compagne qui sache garder aussi habilement, autant de secrets ? » Un léger rire franchissait ses lèvres
« Sebastian écoute le vieil homme que je suis. La vie est difficile. Elle nous rappelle sans cesse que nous ne sommes que de petits points insignifiants dans l'immensité d'un univers qui nous surpasse. Dieu nous en est témoin. Mais dans notre miséricorde, tu ne dois pas oublier ce qui compte. Tu ne dois pas perdre de vue l'essentiel et te souvenir qu'il y a encore quelqu'un qui compte sur toi. Quelqu'un qui a besoin de toi, pour avancer et purger sa peine » Son buste se tournait vers son ancien élève
« Tu dois être fort, pour Eleanor. Tu es son seul point de repère dans les ténèbres qui envahissent cette petite fille. Il faut que tu prennes conscience que l'épreuve que tu traverses actuellement, est une porte pour te faire réaliser à quel point, il n'y a pas plus précieux que le souffle qui entre et s'extirpe de tes poumons. Qu'il n'y a pas plus précieux que ta fille. Ne commets pas deux fois la même erreur. La vengeance est l'amie du diable » Ses lèvres se pinçaient, les humectant machinalement
« Continue de vivre, Sebastian. Ne regarde pas derrière toi. Penche toi vers l'horizon. Et si tu ne le fais pas pour toi, fais le en la mémoire de ta femme, au nom de son dévouement. Pour ta fille. Et n'oublie jamais : l'Amour Sebastian. L'Amour. C'est ce qui te permettra d'avancer. »***
Ce jour-là, il pleuvait aussi alors qu'Eleanor était une fois de plus en proie à une terreur nocturne. L'accident. La voiture. Les flammes. Son cri crevait l'atmosphère sur un appel au secours désespéré et perçant. Sebastian se posait ainsi à côté d'elle alors que la gamine l'agrippait de toutes ses petites forces, haletante et fiévreuse
« Je l'ai vu » indiquait-elle, essoufflée par le mauvais tour de son subconscient nocturne
« Maman, je l'ai vu » Sa paume se posait sur sa tignasse à la saveur de blé d'orge, rassurant comme l'aile protectrice d'un aigle noir qui surplomberait les plus hautes montagnes
« Je suis là » La princesse se pelotonnait contre son père, cherchant à s'abriter de cette torpeur qu'elle craignait revoir surgir, sanglotant chaudement au creux de ses bras
« Elle me manque » A moi aussi, pensait-il, se gardant bien de concrétiser sa pensée
« Mon cœur. Écoute moi » Ses doigts glissaient dans ses cheveux dorés sur de légères caresses tendres et douces
« Ta mère est à un endroit où tu ne peux plus ni la voir ni lui parler mais sache, qu'elle te regarde et t'observe chaque seconde qui s'écoule » « Même quand je pique des bonbons dans l'armoire ? » Il lui offrait un sourire
« Oui, même pour ça » La fillette faisait remonter ses joues en étirant ses lèvres
« J'aimerai qu'elle puisse me gronder » Ses yeux bleus tombaient plus bas, entortillant ses doigts
« Tu crois que je pourrais la revoir ? » Sebastian se mordait l'intérieur de la joue. C'était délicat
« Je n'en sais rien ma puce. Toutefois, il y a une chose dont je suis certain. C'est que tu dois continuer de porter tous les jolis souvenirs qu'elle a pu nous transmettre » « Pourquoi ? » « Parce qu'il n'y a qu'en continuant d'aimer quelqu'un, en conservant précieusement ses mémoires qu'elle continuera d'exister. Peut-être pas là, avec nous, mais là-dedans » Son index se levait pour pointer vers sa poitrine
« Dans ce cœur là, qui a encore la chance de battre et de ressentir » « Moi, ça me rend seulement triste Papa » « Je sais » Lentement, le grand homme se faufilait sous la couette de sa progéniture pour s'installer avec elle et lui toucher le bout du nez
« Nous devons avancer ensemble et nous protéger mutuellement. C'est ce que ta mère veut. Elle veut que nous soyons heureux, tous les deux » « Tu crois ? » « J'en suis même certain » La gamine le fixait, quelque peu sceptique, puis se détourna pour attraper son ours en peluche et revenir vers son paternel
« Tu promets que tu resteras avec moi pour toujours ? » Ce vœu lui tira une onde de chaleur qui irradiait dans tout son être, à tel point qu'il l'attirait contre lui pour la serrer de tout son amour
« Évidemment, je serai toujours là pour veiller sur toi. N'oublie jamais Eleanor, que tu seras toujours l'essentielle de mon existence, quoiqu'il arrive. Ton père t'aime et c'est ce qui nous liera toujours l'un à l'autre, et à ta mère. Elle vivra toujours à travers nous »N'oublie jamais : L'Amour Eleanor. L'Amour. C'est ce qui te permettra d'avancer.