[EVENT] Lune Rousse | Le rêve - Cameron

Messages : 113 Âmes : 59 Date d'inscription : 11/10/2020

Lune Rousse

Après cette escapade nocturne, tu as trouvé un endroit pour t’abriter. Un espace où tu te sens en sécurité. Tes membres sont engourdis, et tes pensées ralenties. Il fait chaud, mais froid à la fois. Il fait clair, mais sombre à la fois. Tu as peur, peut -être pour la première fois ou peut-être pas ? Le jeu a commencé. Tu es en train de rêver. Un rêve lucide, qui paraît si réel. Les sensations ne sont pas tronquées, tu es libre d’agir enfermé dans ce rêve. La vraie question cependant qui doit être posée reste cachée : n’est-ce vraiment qu’un rêve ?

Lorsque tu ouvres les yeux, ta vision est déformée. Seules trois couleurs nuancent les formes étranges autour de toi et les lignes en perspective semblent s’étendre à l’infini. Ton nez perçoit des fragrances inédites, des odeurs qu’il peut reconnaître en une fraction de secondes qui semblent se démultiplier lorsque tu bouges. Ta gorge est humide, tu sens de la bave couler le long de ton visage. Ta langue est courte, d’une forme que tu ne sais pas identifier, et en léchant tes lèvres tu découvres des canines acérées. Tes muscles sont tendus, tu te déplaces à quatre pattes, courbé sur le sol sans ressentir de tension dans ta colonne. D’ailleurs, ta colonne n’est pas droite, et quelque chose semble s’en échapper, s’élevant vers le haut.

Tes oreilles perçoivent des signaux incompréhensibles, des sons que tu n’avais encore jamais entendu. Des sons stridents, des cris, des bruissements de pas, des hurlements bestiaux qui se dirigent dans ta direction. Ta vue est ponctuée de points lumineux, brûlants, qui s’agitent dans ta direction. Ta conscience est intacte, mais tu sens ton esprit cohabiter avec quelque chose d’autre, d’inhumain. Des pulsions animales s’animent en toi, tu peux les percevoir avec vigueur. Elles éveillent une colère, une faim et une peur, un besoin de courir très loin d’ici. Devant toi, tu les reconnais, des hommes accourent vers toi, armés de fourches, de lances et de torches. Tu es seul, mais une voix te chuchote au creux de l’esprit : « Cameron, ta traque a commencé, tu sais courir j’espère ? ».

Puma ♪ TXT (slowed ver.)clickCameron R. Ross
Ft. Lune Rousse« West side, east side
Didn’t know where to go
Tonight we ride
West side, east side
It doesn’t matter anymore
They came, catch my back »
Après cette promenade nocturne aux allures de chemin de croix, accablé par tes pensées aussi sombres que le ciel étoilé, tu es rentré chez toi. La lune rousse projetait des rayons enflammés par la fenêtre du palier du dernier étage. Exténué, tu as laissé tes clés, tes chaussures et ta veste dans l’entrée avant de rejoindre la cuisine d’un pas lent sans allumer la lumière. Tu as observé les silhouettes floues des meubles qui s’inscrivaient dans la pénombre aux lueurs orangées. L’astre de minuit trônait entre les rideaux, semblant t’observer de toute sa puissance, flottant parmi le firmament comme un juge menaçant. Tu t’es traîné vers les étagères et les placards pour y chercher une bouteille d’alcool, tu n’as pas su reconnaître de quoi il s’agissait dans l’obscurité, à l’odeur c’était sûrement de la vodka. Tu as bu une longue gorgée pour t’anesthésier les papilles, faire brûler ton gosier en cherchant à reprendre consistance, à sentir la vie te traverser.

Puis, soudain, sans crier gare, tu as craqué. Ton poing s’est abattu sur le plan de travail avec une violence inattendue, une douleur pointant le long de ton poignet la seconde qui suivait. Un sanglot s’est étranglé dans ton souffle avant qu’un torrent de larmes ne déferle sur tes joues. Tu as titubé, te rattrapant sur le bar derrière toi. Tes jambes se sont dérobées et tu t’es affalé par terre, ton dos coulant sur le bois et tes jambes s’étalant sur le parquet froid. Fixant les lignes du plafond, tu as pleuré pendant de longues minutes, de tout ton saoul, le visage dégoulinant. Tu ne cherchais même pas à essuyer ton nez et tes yeux, attendant sûrement que l’inondation se prolonge jusqu’à son terme pour te donner cette peine. Quand tes hoquets se sont calmés, tu as trouvé le courage de te lever pour aller chercher plusieurs mouchoirs dans lesquels tenter de cacher cette tempête émotionnelle.

Affalé dans le canapé, tu as fumé une cigarette, la savourant comme le dernier pilier d’un bâtiment à l’abandon. Ta dernière béquille avant de finir définitivement à genoux dans ce brouillard environnant dans lequel tu étais en train de t’égarer. Tu as contemplé une nouvelle fois le plafond et ses fissures, ses irrégularités, ses craquelures comme la plus imparfaite des toiles. Tu cherchais à travers lui une forme de quiétude, étudiant les volutes de fumée qui s’élevaient au-dessus de ton visage à chaque expiration, bariolant le tableau dans des vagues plus ou moins opaques, où la lumière rousse de la lune se reflétait dans les contours. Et une fois que tu aies écrasé la cigarette dans le cendrier, la fatigue t'a gagné, une torpeur reconnaissable, signe que tu avais besoin de sommeil, t’a enveloppé et tu as sombré dans le monde tourmenté des songes.

***

뜨거 뜨거 뜨거 뜨거
뜨거 발이 데인 나
눈떠 느껴 숨 쉬어 꿈꿔
꿈꿔왔던 세상

Ce qui me frappe d’abord, ce sont les odeurs. Je n’avais jamais reconnu autant de parfums en une seule inspiration. Le sous-bois recèle des senteurs que j’identifiais mal auparavant mais là, tout est limpide. La terre, la pluie qui l’a détrempée et l’humidité qui en résulte, l’humus, puissant et végétal, l’odeur douce et boisée des champignons, presque sucrée, les feuilles mortes et leurs accents de fumée, de feu qui crépite, une émanation de tourbe et de vase, la décomposition, les effluves acres et acides d’urines animales, d’excréments, sur lesquelles se superposent des arômes floraux multiples dont certains, je le sais, sont toxiques. Toutes ces informations affluent, transcendent un odorat soudain développé. Mais je ne reconnais pas ma propre odeur, pas de relents de tabac, de sueur et de gel douche. Je ne flaire que des essences bestiales, de fourrure mouillée et d’haleine fétide.

Puis j’ouvre les yeux et je ne comprends pas mon environnement. Les couleurs sont effacées ou disposées aléatoirement, je ne saurais dire. Il semble faire nuit pourtant je distingue parfaitement les formes et l’horizon semble plus éloignée, s’étendant vers un infini qui me semble encore moins atteignable. Le monde est plus bas, comme si j’étais à quatre pattes. Le ciel est plus haut. L’univers plus vaste encore. Mais cette forêt m’apparaît comme une carte dont je connais les sentiers et les chemins entre les arbres, un instinct qui me guiderait dans la jungle. Rien n’a de sens dans cette vision pour mon esprit humain mais je ne suis pas perdu car une conscience qui parle à travers moi a établi son territoire dans cette dimension sauvage inconnue.

Les sons qui me parviennent sont comme une mélodie dissonante. Dix mille mains frappant au hasard sur un piano aux touches illimitées. Je retrouve des bruits familiers mais l’ensemble est un tourbillon d’informations en désordre. Au-delà du bruissement du vent dans les arbres, j'entends l’hululement des oiseaux de nuit, les hurlements des loups qui crient à la pleine lune, le glapissement des renards en chasse et les couinements des lapins à l’abri dans leur terrier, les bramées de cerfs aux abois, les grincements des chauve-souris dont je distingue même les battements d’ailes, quelques craillements de corbeaux et de corneilles qui prennent leur envol, le coassement lointain des grenouilles dans les marais et divers chants d’animaux à poils ou à plumes. Une ribambelle de signes de vie qui résonnent et se répondent en écho dans la forêt comme des alertes, des menaces ou des appels.

De la bave coule le long de ma gorge et une fine écume recouvre ma bouche. J'ignore ce que j'ai bien pu avaler mais un goût étrange torture mes papilles sans que je ne parvienne à l’identifier. C’est acide et amer à la fois, un cocktail inconnu comme si j'avais croqué dans un pamplemousse pourri et dégusté une viande avariée crue aux saveurs fortes de gibier. Un fumet étrange qui me reste collé au fond de la langue, s’y accroche et embaume l’air que j'expire.

Je me tiens effectivement à quatre pattes, je sens ma colonne vertébrale être souple et déliée, mes omoplates relevées vers le haut, comme un félin pistant sa proie. Mon corps semble monté sur ressorts, tous mes muscles sont tendus, en alerte, prêts à déguerpir au moindre signe de danger. Je sens sur ma langue des crocs acérés, des canines pointues qui pourraient déchiqueter la chaire et broyer les os. Mes pattes sont pourvues de griffes tranchantes et mes coussinets ressentent et analysent en permanence les vibrations et altérations du sol. Sensation étrange que de sentir une longue queue battre la mesure dans mon dos, fouettant l’air comme pour démontrer ma nervosité.

Je suis devenu un animal. Un fauve. Un monstre ? Un esprit primitif a la moitié du contrôle de ce corps difforme et inconnu. Je suis parfaitement conscient d’être coincé dans cette créature et elle doit vraisemblablement elle aussi se faire à la cohabitation. Ou alors serait-ce ma propre volonté mise à nue ? Je ne saurais le dire. Loin des murmures des voix dans ma tête, c’est de l’ordre d’un instinct furieux, bestial, inhumain. Il me possède. Des pulsions brutes me frappent comme des ondes d’une vigueur incommensurable. Je ne peux pas aller contre elles. Je suis à leur merci. Prisonnier de ces sensations violentes, qui fourmillent le long de mes membres et m’assaillent de sensations incessantes qui se multiplient et se superposent. Sans comprendre pourquoi, je suis esclave de ce que je perçois. De ce que je ressens.

Une colère indicible m’aveugle et plombe mon esprit dans une rage sans frontières. Une faim intolérable me tord les entrailles et gronde dans tout mon corps. Une peur incontrôlable m’habite et efface chaque tentative de pensée rationnelle. Je suis soumis à ces trois émotions, sensations reléguées à nos bas instincts ancestraux mais à cet instant, ils sont ma seule vérité.

Et dans ce paysage de cauchemar dont je ne sais pas bien si je saurais m’extirper tant il semble réel, je vois soudain des points lumineux s’agiter, comme des silhouettes dorées que je verrais à travers une lunette thermique. Des formes humanoïdes indistinctes qui se rapprochent comme des flammes menaçantes d’un incendie qui avalerait tout sur son passage. Mes sens sont en alerte et décodent à une vitesse vertigineuse le reste des informations. Ce sont des cris, l’animal les trouve menaçants, il est apeuré et grogne par réflexe. Moi, j'y lis de la haine, un appel à la traque, au sang et à la mort. Les martèlements de la terre m’indiquent qu’ils sont en train de courir dans ma direction. Une odeur de feu m’informe qu’ils sont armés de torches et bientôt j'entrevois leur lueur entre les fourrés. Puis ils émergent enfin, une troupe d’hommes brandissant fourches et lances.

C’est alors qu’un seul ordre s’imprime en moi : fuit.

D’un bond, je déguerpis dans la forêt, quittant le sentier, filant à toute allure entre les arbres, sautant par-dessus les ronces et les fougères. Mon cœur s’emballe mais je sens que mon nouveau corps est préparé à un tel périple. Je cours, ventre à terre, aussi rapide et agile qu’un puma. Je galope, je m'élance parmi les buissons, me ruant le plus loin possible de mes poursuivants. Ma cavale ne fait que commencer, ils me pourchassent et je les entends encore à ma suite, hurler à mort et se précipiter pour tenter de me rattraper. Je détale à la vitesse de l’éclair comme si j'avais le diable aux trousses. Qu’importe ce qui a poussé ces trappeurs à me prendre en chasse, ma seule réponse est la fuite.

« Cameron, ta traque a commencé, tu sais courir j’espère ? »

여긴 사방은 까맣고
심각한 분위기로
귓가에 들리는 건
Bang bang bang
달려야 해

:copyright:️ 2981 12289 0

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'Lune rousse - 2020' :
[EVENT] Lune Rousse | Le rêve - Cameron Dagi

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Lune Rousse

Le paysage défile à toute allure autour de toi, ses trois couleurs se brouillent et se mélangent en une pellicule argentique délavée. Les sons te parviennent de toutes parts, des insultes que tu ne comprends plus, des cris de rage bestiaux, des bruits de pattes d'autres animaux à ta poursuite. Mais aussi les pleurs de la forêt dans laquelle tu cours. Entre les arbres, ses lamentations sillonnent, bruissant les feuillages et sifflant contre tes tympans. Tu te déplaces si vite, que tu trébuches par moment, roulant dans la terre sur quelques mètres avant de repartir d'aussi vite. Parfois, tu esquives des obstacles au dernier moment, parfois tu ne parviens pas à les contourner. Les blessures qui ornent ton corps se multiplient, et ton cœur bat si vite qu'il te faudra très vite t'arrêter avant qu'il ne lâche définitivement.

Tu dépasses une clairière, et là où tu vas, l'odeur du sang empeste. Un arrière goût amer métallique, au travers duquel des notes familières déteignent. Tu ne serais pas déjà venu ici ? Cette forêt t'es bien plus connue que tu ne voudrais le croire. Dans des flashs grisés, des souvenirs lointains et brouillés défilent au creux de ton esprit, et tu pourrais sentir des larmes couler sur tes joues, ou bien serait-ce la pluie qui déchire le ciel de ses zigzags insensés ? Il y a une grotte au loin, plus loin proche des montagnes. Tu devrais peut-être y aller. Ou bien...?

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Damned Town

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